Le grand défi des petites créances

Nouvelles d'Éducaloi
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Deux ans. C’est à peu près la moyenne qu’il faut attendre au Québec pour être entendu par la Division des petites créances de la Cour du Québec. Ayant à cœur l’accès à la justice, Éducaloi et Millénium Québecor ont lancé un concours d’idées afin de moderniser et humaniser l’expérience de la population lorsqu’elle doit avoir recours à ce tribunal.

L’équipe gagnante du Défi Éducaloi tandis qu’elle présente sa solution devant le jury et le public présent.

Trois équipes formées d’étudiantes et d’étudiants universitaires de différentes disciplines ont participé à ce concours d’idées. Leur mandat? Trouver des solutions qui permettraient à une personne de préparer, déposer, suivre et comprendre sa cause aux petites créances grâce à l’intelligence artificielle et au design juridique. Mais attention, tout ça sans perdre l’aspect humain et équitable du processus!  

Le 26 novembre dernier au Café Ax.c de la Place Victoria à Montréal, ces équipes ont eu le plaisir de présenter leur solution au public présent, mais également à un jury composé de sept personnes issues du milieu juridique ou entrepreneurial. Bien que toutes les propositions étaient intéressantes, comme dans tout concours, le jury devait choisir un projet en particulier.

Une tâche qui semble ne pas avoir été facile, puisque les délibérations se sont un peu étirées et qu’il y a eu une première place et deux… deuxièmes places!

À l’arrivée, un prix de 2000 $ pour l’équipe gagnante, MPC Inc., et deux prix de 1500 $ pour les autres équipes, Petite justice et Éducréance.

La robustesse de la solution proposée est le facteur principal qui a permis à l’équipe gagnante de se démarquer, selon l’un des membres du jury, Stéphan Parent, directeur aux projets spéciaux chez Novom.

« Ils ont vu une solution quand même large et robuste, précise Stéphan Parent. C’était l’équipe avec laquelle on avait le moins d’incertitudes. »

Une IA « symbolique »

Composée d’une étudiante en droit, Sophie Fan, et de trois étudiants en mathématique et informatique, Yassine Chahdi, François Frigon et Rayane Mili, l’équipe gagnante n’a pas souhaité miser sur une IA générative – telle que ChatGPT – pour son projet. Donc, exit le chatbot comme solution à cause des hallucinations que peut avoir ce genre de technologie, mais également pour une question de coût, de performance et d’impact environnemental.

L’équipe MPC Inc. a plutôt porté son dévolu sur une « IA symbolique » pour la création de leur outil baptisé « Mes petites créances ».

« La réflexion principale qu’on a avait eu, c’est [le risque] de donner des conseils juridiques. On se demandait si c’était quelque chose de légal », raconte François Frigon qui a également fait des études en management.

Ainsi, pour éviter que des informations inexactes soient transmises par une IA générative aux utilisatrices et utilisateurs, l’équipe a opté pour une IA qu’elle qualifie de « symbolique » qui opère avec des règles claires et avec laquelle il est plus facile de contrôler l’information donnée.

Faciliter la préparation du dossier, c’est l’objectif principal de cet outil afin d’accompagner une personne qui souhaite s’adresser à la Division des petites créances de la Cour du Québec. « L’information est là. Il y a les sites, il y a Éducaloi, mais les personnes ne s’y retrouvent pas, soutient Sophie Fan en parlant de l’écosystème juridique au Québec. [L’information] est éparpillée partout. C’est tellement dense. »

Comprendre est donc le défi premier pour les personnes qui ont besoin de cette information juridique, tout particulièrement dans une situation de stress.

Et comment leur solution peut-elle contribuer au désengorgement de ce tribunal? En réduisant le nombre de dossiers rejetés et en augmentant le taux de personnes qui considèrent la médiation avant de se tourner vers le tribunal. « Ça réduit la charge administrative, explique François Frigon. Notre solution offre une sorte de préremplissage des différents formulaires qui sont à compléter par les utilisateurs. »

Un accompagnement qui est optimisé par des balises et garde-fous qui réduisent la possibilité de faire « des erreurs communes et évitables », ajoute l’étudiant.

Une version hybride

À la fin de la soirée, le directeur général d’Éducaloi, Frédérick Roussel, a rappelé que les solutions proposées par toutes les équipes seront considérées, pas seulement celle de l’équipe gagnante. Rien de surprenant, car la compétition a été véritablement serrée et qu’il n’est pas exclu de prendre le meilleur de chacune des solutions présentées afin d’aboutir à un résultat optimal qu’Éducaloi aimerait proposer au ministère de la Justice et à d’autres partenaires.

« Le tri des dossiers qui ne sont pas admissibles aux petites créances est important pour réduire le traitement, soutient Frédérick Roussel. Idem pour des outils qui permettent aux citoyens de vérifier s’ils ont les preuves nécessaires. »

Il ne faut pas oublier le côté humain et psychologique, ajoute-t-il. « Une cause aux petites créances est souvent source de stress ».

En activité depuis trois ans, Millénium Québecor a pour mission de développer une culture entrepreneuriale responsable et de soutenir la réalisation de projets d’entreprises qui ont un impact dans la société en impliquant des étudiantes et étudiants de l’Université de Montréal, toutes disciplines confondues.

Le défi d’innovation qui vient d’être réalisé en collaboration avec Éducaloi a pour but premier de développer les compétences transversales des étudiantes et étudiants, a expliqué en entrevue Marie-Claude Lemire, directrice générale de Millénium Québecor – Université de Montréal.

« L’idée de base, c’est d’offrir à des étudiants la possibilité de travailler sur les solutions à des problématiques », a-t-elle précisé. Un exercice qui leur permet de développer de nouvelles compétences et la capacité de travailler avec des personnes issues d’autres disciplines que la leur.