Conseil de presse du Québec : le droit à une information de qualité

Entrevues
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Selon un rapport publié par le Centre d’études sur les médias en juin dernier, moins de deux personnes sur cinq au Canada ont confiance en l’information journalistique. Il existe pourtant un organisme québécois qui s’assure de protéger la liberté de la presse, mais également de défendre le droit du public à une information de qualité.

Depuis plus de 50 ans, le Conseil de presse du Québec recueille les plaintes au sujet du travail journalistique. Sur la base de leur Guide en déontologie journalistique, le Conseil analyse ces plaintes et rend des décisions déterminant si elles sont légitimes ou non. 

« Contrairement à ce que certains croient, les journalistes doivent suivre des règles, répond de but en blanc le président du Conseil de presse, Pierre-Paul Noreau, au micro de l’émission Angle droit. Il y a une déontologie, des règles de bonnes pratiques qui font que ce qu’on produit peut être de grande qualité ». 

Et si ces règles ne sont pas suivies, la qualité peut être moindre, ajoute-t-il.  

Lorsqu’on lui demande d’expliquer cette perte de confiance du public envers les médias, Pierre-Paul Noreau pointe d’entrée de jeu les personnes qui affirment, selon lui, que « les médias sont les ennemis du peuple ». Ensuite, il fait une distinction entre le public en général et les gens qui consomment régulièrement de l’information auprès des médias traditionnels. 

« Si vous le demandez au public en général, il est vrai qu’il y a un certain ras de bol de l’information. Il y en a qui ne veulent plus rien savoir, qui ne lisent plus d’information, parce que c’est trop déprimant, inquiétant, anxiogène. Mais ceux qui croient que c’est important d’être informés, que ça aide à prendre de meilleures décisions, à comprendre les enjeux qui nous confrontent, ces gens font grandement confiance aux médias », soutient le président du Conseil.   

Pour écouter la version audio de cette entrevue :

L’autorégulation de la presse 

Le Conseil de presse fonctionne par un mécanisme d’autorégulation indépendant, plutôt qu’un régime « d’autogestion contrôlée » appliqué dans les ordres professionnels. « On craint la réglementation », explique Pierre-Paul Noreau, ayant à cœur la liberté de la presse.  

Un gouvernement peut avoir de bonnes intentions et fixer des règles, comme exiger des études en journalisme ou qu’une personne souhaitant pratiquer ce métier ait eues un mentorat, mais les gouvernements changent, rappelle-t-il.  

Ainsi, le Conseil de presse est un organisme privé à but non lucratif et indépendant, dont presque la moitié du financement provient de leurs membres, c’est-à-dire des entreprises qui détiennent des journaux, des magazines, des stations de radio et des chaînes de télé. 

« Nos membres, ce sont les médias qui paient une cotisation et [qui] risquent de se faire blâmer. C’est parce que tout le monde convient qu’il vaut mieux avoir un système d’autorégulation, que d’avoir le gouvernement qui vient dire que ça devrait marcher de cette façon. » 

Les ordres professionnels

À l’instar du Conseil de presse, les ordres professionnels ont pour mission de protéger le public. Mais, contrairement au Conseil de presse, les ordres peuvent contrôler l’exercice de la profession par leurs membres. Ils peuvent notamment exiger une formation précise, limiter ou suspendre le droit d’exercice de la profession à une personne, ou intenter une poursuite pénale pour exercice illégal de la profession.

Comment faire une plainte? 

Vous souhaitez faire une plainte concernant un média ou une ou un journaliste? Le processus est simple, selon Pierre-Paul Noreau. Il suffit de remplir un formulaire sur le site du Conseil de presse, explique-t-il, mais cette plainte doit s’appuyer sur des principes déontologiques. 

« [Dire que] “j’aime pas le commentaire de Patrick Lagacé”, ce n’est pas de la déontologie, donne-t-il comme exemple. Mais si vous dites qu’il y a partialité, discrimination, incomplétude, à ce moment, oui, il y a une matière à déontologie. » 

Après le dépôt d’une plainte, un comité évalue sa recevabilité. Si la plainte est acceptée, une médiation peut être offerte, mais uniquement si elle concerne une seule plaignante ou un seul plaignant et un seul média.  

« S’il y a davantage de gens, c’est trop complexe », soutient le président du Conseil.    

Dans ce cas, ou si la médiation ne fonctionne pas, un dossier est monté, puis soumis à un comité de plaintes. Ce comité est constitué de journalistes, de représentantes et représentants d’entreprise de presse, ainsi que de personnes issues du public.  

« Les patrons de presse et les journalistes ne sont pas toujours sur la même longueur d’onde », fait remarquer Pierre-Paul Noreau. 

Être membre du Conseil de presse : qu’ossa donne? 

En 2023, sur les 91 plaintes reçues, 53 ont été transmises au comité de plaintes et ont fait l’objet d’une décision. Pierre-Paul Noreau tient à rappeler que le Conseil ne peut être assimilé à un tribunal civil et ne possède aucun pouvoir judiciaire, réglementaire, législatif ou coercitif. La seule sanction qu’il peut imposer est donc morale. 

Les membres du Conseil doivent en revanche publier les décisions les concernant, qui plus est lorsqu’ils reçoivent un blâme.  

« Je dois vous dire que dans les salles de rédaction, quand on reçoit une plainte du Conseil de presse, ça dérange », soutient le président du Conseil.  

Et même si un média n’est pas membre, le Conseil de presse peut traiter une plainte le concernant.  Alors, qu’est-ce que cela apporte aux médias d’être membres du Conseil, si cela ne change rien au traitement des plaintes? 

« Être membre du Conseil de presse, c’est adhérer au meilleur standard de l’industrie [des médias]. C’est dire publiquement : “nous, on ne travaille pas n’importe comment. On travaille en respectant des règles.” »