Contestation de la Loi sur la laïcité de l'État : des éléments pour bien comprendre

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Ce lundi 2 novembre s’ouvrait à Montréal le procès contestant la Loi sur la laïcité de l’État, aussi connue comme le « projet de loi 21 ». Voici les principaux éléments pour comprendre les enjeux du procès.

Les arguments invoqués

La Loi sur la laïcité de l’État a été adoptée en juin 2019. Elle interdit notamment que certains employés de l’État, comme les juges, les policiers ou les enseignants, portent des signes religieux lorsqu’ils exercent leurs fonctions.

Selon les groupes qui contestent cette loi devant les tribunaux, elle ne respecte pas la Charte canadienne des droits et libertés. Par exemple, certains groupes invoquent l’article 23 de la Charte qui protège le droit de la minorité anglophone d’être instruit dans cette langue. D’autres groupes invoquent l’article 28 de la Charte qui protège l’égalité des sexes.

De son côté, le gouvernement soutient que la loi protège la liberté de religion et l’égalité entre les femmes et les hommes. Il invoque que la loi s’applique à tous, peu importe leur religion ou leur sexe, et qu’elle a pour objectif d’assurer l’égalité de tous devant l’État.

Attention! La loi exige aussi que certains services publics soient donnés et reçus à visage découvert. Toutefois, cette règle ne s’applique pas lorsque le visage est couvert pour un motif de santé, d’handicap ou pour l’exécution de certaines tâches. Vous pouvez donc recevoir ces services publics même si vous portez un masque pour prévenir la COVID-19!

La Charte et sa « clause nonobstant »

L’article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés permet d’adopter une loi qui déroge à certains articles de la Charte. On l’appelle la « clause nonobstant », « clause dérogatoire » ou « clause de dérogation », c’est-à-dire que la loi est adoptée malgré la Charte. La Loi sur la laïcité de l’État invoque cette clause de dérogation prévue dans la Charte.

Lorsque cette clause est invoquée, la loi s’applique même si elle pourrait contrevenir à des droits et libertés prévus à la Charte, par exemple :

  • la liberté d’expression,
  • la liberté de religion,
  • la liberté de réunion pacifique,
  • le droit à la vie,
  • le droit à la liberté,
  • le droit à la sécurité,
  • le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives,
  • le droit à la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires et
  • le droit à l’égalité.

Cette dérogation est valide pour 5 ans. Elle peut être renouvelée.

Les groupes qui contestent la loi invoquent des articles de la Charte qui ne sont pas affectées par la clause de dérogation.

La clause de dérogation a notamment été utilisée en 1988 pour la Charte de la langue française afin d’empêcher d’utiliser une autre langue que le français pour l’affichage extérieur. Cette clause dérogatoire est maintenant expirée et l’affichage en anglais est permis à la condition que le français prédomine.

La Charte québécoise a aussi sa clause de dérogation

Elle est notamment utilisée pour interdire d’être représenté par un avocat à la Cour des petites créances, malgré un article de la Charte québécoise qui prévoit que toute personne a le droit d’être représentée par un avocat.