En décembre 2024, on apprenait dans les médias que des chasseurs s’identifiant comme Mohawks auraient abattu des orignaux, de nuit, dans les réserves fauniques de Matane et de Rimouski. Ces activités de chasse de nuit se seraient produites au cours des trois dernières années. Elles ont été dénoncées par diverses associations, arguant que cette pratique est interdite par la loi. Qu’en est-il vraiment? Et, comment coexistent les règles encadrant la chasse au Québec et les droits ancestraux des Premières Nations?

La Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune interdit de chasser le gros gibier la nuit avec un projecteur, communément appelée « chasse au spot ». Cette loi interdit également l’utilisation de réflecteurs, ainsi que l’utilisation d’appareils de vision nocturne ou d’imagerie thermique.
Interrogé par les médias, le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs a rappelé qu’en plus de contrevenir à la loi, la chasse de nuit pose des problèmes liés à la sécurité. Le Ministère n’a pas souhaité faire davantage de commentaires, indiquant qu’une enquête était en cours concernant ces événements à Matane et Rimouski.
C’est quand la nuit?
La Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune précise que la nuit est « la période de temps entre une heure et demie après le coucher du soleil et une heure et demie avant son lever ». Cette loi interdit également d’être en possession et d’utiliser une arme la nuit dans un endroit fréquenté par le gibier, sans « excuse raisonnable » ou sans permis. Elle interdit de plus de se trouver la nuit à bord d’un véhicule avec une arme chargée hors de son étui.
En revanche, des exceptions existent pour la chasse de nuit de certaines espèces. En effet, le Règlement sur la chasse autorise notamment la chasse nocturne du lièvre et du lapin, au moyen de collets, ou encore, le raton laveur, à l’aide d’un chien de chasse.
En outre, la chasse de nuit peut potentiellement être reconnue comme un droit ancestral d’une communauté autochtone.
Droits ancestraux et droits issus de traités
Les communautés autochtones ont le statut de peuples originels du Canada. Elles ont des droits ancestraux qui sont reconnus par la Loi constitutionnelle de 1982. En principe, les lois fédérales et les règlements ne doivent pas porter atteinte à ces droits ancestraux ou issus de traités.
Ces droits peuvent parfois être rattachés à un territoire particulier, mais pas toujours. L’existence d’un droit ancestral ou issu d’un traité doit être en revanche démontrée devant un tribunal.
Concernant spécifiquement la chasse de nuit ou « au spot », la Première Nation Tsartlip de la Colombie-Britannique est parvenue à faire cette démonstration en 2006, expliquant qu’elle chassait auparavant de nuit à l’aide de flèches et de torches. Ainsi, la Cour suprême de cette province a statué que « l’utilisation d’armes, de spots et de véhicules à moteur reflète l’évolution des pratiques de chasse historiques tsartlips ».
Ce jugement s’applique uniquement à la Première Nation Tsartlip de Colombie-Britannique. Toute autre communauté autochtone qui revendique un droit ancestral ou issu d’un traité, comme celui de faire la chasse de nuit ou « au spot » sur un territoire, doit être reconnu par un tribunal.
Les communautés autochtones peuvent également adopter leurs propres règles pour encadrer des pratiques sur leur territoire, comme la chasse de nuit.
À titre d’exemple, la vice-grande cheffe de la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk (Malécite) où ce genre de chasses auraient été observées a soutenu dans les médias que le code de pratique de leur communauté n’autorise pas la chasse de nuit.
De plus, la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk n’accorderait à aucune autre nation le droit de chasser sur leur territoire, peut-on lire dans le Journal de Montréal.
Peut-on vendre ou acheter de la viande de gibier sauvage? La Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune interdit généralement la vente et l’achat de la viande de gibier sauvage, tel que l’orignal, le cerf de Virginie, le caribou, la gélinotte huppée, ou encore, la perdrix grise. Toutefois, il existe des exceptions, entre autres pour le gibier d’élevage ou gardé en captivité. Mais attention, aucune exception ne s’applique pour l’orignal. En outre, la vente de la viande de lièvre d’Amérique issue de la chasse est permise durant toute l’année. Il faut en revanche détenir un permis de préparation de viandes de lièvre ou un permis de conserves de viandes de lièvre pour que cette activité soit légale. |