Peu importe le problème, quand un tribunal examine le cas d’enfant, il doit toujours considérer son intérêt dans sa décision. En avril 2022, les règles sur la Protection de la jeunesse ont été modifiées pour confirmer l’importance de ce principe. La Cour a rappelé cet élément fondamental de notre droit à une famille impliquée dans une situation difficile.
Une situation familiale difficile
Tout commence en 2021. Deux fillettes, qui avaient alors 8 et 10 ans, sont confiées à des familles d’accueil temporairement. Leur mère et leurs deux pères respectifs ont une série de difficultés : problèmes de consommation de drogues et de dépendance, comportements jugés irresponsables, modes de vie instable. Le Tribunal est donc intervenu pour décider du sort des fillettes : devraient-elles habiter avec leurs parents biologiques ou rester en famille d’accueil?
La Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) demandait ici que les enfants restent dans leurs familles d’accueil jusqu’à leur majorité. La mère et le père de la plus jeune des fillettes ne s’y opposaient pas. Seul le père de la première fillette souhaitait que sa fille vienne habiter chez lui dès que possible.
L’intérêt de l’enfant : un principe de droit
Le principe de l’intérêt de l’enfant est ce qui dicte les règles de la Protection de la jeunesse. Ce n’est pas pour rien que la Loi sur la protection de la jeunesse y fait référence dès ses premières versions.
Avant les modifications de 2022, la loi mentionnait l’importance de maintenir l’enfant dans son milieu familial. L’intention était d’assurer sans délai une stabilité à l’enfant. Mais cette règle devait respecter le principe fondamental de l’intérêt de l’enfant.
Autrement dit l’enfant devait être retiré de sa famille s’il était impossible pour son milieu familial de répondre à ses besoins. De l’aide serait alors offerte aux parents pour les aider à reprendre le dessus et permettre à l’enfant de réintégrer sa famille. La loi mentionnait donc que l’enfant était d’abord et avant tout sous la responsabilité des parents.
En 2022, le gouvernement fait volteface sur cette ambition pour renforcer l’importance de l’intérêt de l’enfant. La règle est maintenant de veiller à ce que les besoins de l’enfant soient comblés, et de seulement privilégier le maintien dans la famille lorsque c’est dans l’intérêt de l’enfant.
Le retour de l’enfant dans sa famille biologique n’est donc pas un élément déterminant lorsqu’il faut prendre une décision dans son intérêt.
L’intérêt de l’enfant, qu’est-ce que c’est? Lorsqu’un tribunal doit prendre une décision dans l’intérêt d’un enfant, il examine ses besoins moraux, intellectuels, affectifs et physiques, mais également son âge, sa santé, son caractère et plus encore. Autrement dit, la situation globale de l’enfant doit être examinée et aucun élément seul n’est décisif. |
Un milieu de vie stable et sécuritaire
Revenons aux fillettes. Le tribunal a conclu qu’il était dans leur intérêt de rester avec leurs familles d’accueil respectives. Chacune d’elles s’est bien adaptée à son nouveau mode de vie et a tissé des liens affectifs avec leurs parents d’accueil. Ces derniers sont très impliqués pour favoriser leur bien-être et leur bon développement. De plus, les fillettes souhaitaient rester avec leurs familles d’accueil.
Entre 2021 et 2023, la situation des parents biologiques a peu évolué : rechute de dépendance, problèmes de gestion des émotions, absence de logement stable et d’emploi… Chaque parent biologique doit encore entreprendre des démarches pour assurer une saine relation avec les fillettes.
En d’autres mots : le lien biologique d’un enfant avec son parent n’est qu’un élément parmi d’autres qui aide le tribunal à trancher. Dans ce cas-ci, l’intérêt des fillettes exigeait qu’elles restent dans leurs familles d’accueil pour plus de stabilité et sécurité.
Cela ne signifie pas pour autant qu’aux yeux du Tribunal, la famille biologique est complètement mise de côté! Les fillettes continuent d’avoir des contacts entre elles et avec leurs parents, en fonction de leurs besoins.