Méfiez-vous des imposteurs qui vous disent pratiquer le droit  

Décryptage
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Le droit se pratique selon certaines règles. De manière générale, une personne ne peut pas pratiquer le droit sans être officiellement avocate, avocat ou notaire. Si vous aimez les séries judiciaires, vous penserez sûrement à des personnages fictifs comme Mike Ross dans Suits. Pourtant, des situations de pratiques illégale du droit peuvent être réelles. Au Québec, le Barreau traite environ 70 dossiers de ce type chaque année. Comment distinguer les imposteurs des avocates et avocats de confiance?  

Un cas récent qui a défrayé la chronique est celui de Mégan Lalonde, une fausse avocate qui a trompé plusieurs personnes en leur offrant des services juridiques qu’elle n’était pas autorisée à fournir. Depuis avril 2024, Megan Lalonde est visée par une poursuite du Barreau du Québec pour exercice illégal de la profession. Le Barreau lui a ordonné de payer une amende de 7500 $, qu’elle n’a toujours pas payée et dont elle conteste la légitimité. Encore plus récemment, en août 2024, la fausse avocate a été condamnée à 45 jours de prison après avoir plaidé coupable à cinq chefs d’accusation de fraude et d’entrave au travail des policiers. La fraude était en lien avec l’exercice illégal de la profession d’avocat dans cinq dossiers depuis 2021. Et ce n’est pas tout : d’autres comparutions au tribunal l’attendent dans les mois à venir pour d’autres dossiers de fraude. 

Cette histoire nous permet de lever le voile sur les tenants et aboutissants de la pratique illégale du droit au Québec. 

Des conditions strictes  

Pour pratiquer le droit au Québec, il faut généralement être membre du Barreau du Québec ou de la Chambre des notaires.  

Cette exigence s’applique généralement à toute personne qui souhaite offrir des consultations ou des avis juridiques. Pour mieux comprendre, un « avis juridique » consiste notamment à donner une réponse personnalisée sur la façon dont le droit s’appliquerait à un cas particulier. 

Une personne qui agirait de manière à laisser croire qu’elle est avocate pourrait être en train de pratiquer illégalement la profession. Ce pourrait notamment être le cas si une personne se présente faussement comme avocate ou avocat ou utilise le titre « Maitre » ou « Me » .  

Les conséquences peuvent être graves pour une personne qui donne un avis juridique ou se prétend avocate sans être membre du Barreau. Elle peut avoir à payer des amendes importantes pouvant aller jusqu’à 62 500 $, voire 125 000$ en cas de récidive. Dans certains cas, elle peut même être accusée d’un crime, en cas de fraude par exemple. La fraude vise souvent à tromper une personne pour lui faire perdre de l’argent. 

Les personnes nouvellement arrivées, une cible privilégiée des imposteurs  

Dans une affaire de 2019 jugée à Montréal, un couple entre en contact avec un homme qui se disait avocat. Le couple faisait l’objet de menaces dans leur pays d’origine et cherchait désespérément à immigrer au Canada. L’homme recueille leurs renseignements personnels, remplit leur formulaire de demande d’asile, et leur assure qu’il les accompagnera tout au long de leur processus d’immigration. Mais leur demande d’asile est rejetée. Intrigués, ils enquêtent et découvrent que l’homme en question n’est pas membre du Barreau.  

Les personnes nouvellement arrivées au Québec seraient souvent la cible de pratiques frauduleuses. Selon Tamara Davis, directrice générale du Barreau de Montréal, interrogée à l’émission Angle droit, les imposteurs se font notamment passer pour des avocates et avocats spécialisés en droit de l’immigration. Ces personnes prétendent gérer les dossiers d’immigration en échange de sommes d’argent. 

Les principales victimes de ces arnaques sont souvent celles qui : 

  • souhaitent demander l’asile au Canada, 
  • font appel d’un refus de demande d’asile, 
  • cherchent à parrainer leur conjointe ou conjoint résidant à l’étranger.  

Les scénarios couramment observés incluent de fausses avocates ou de faux avocats qui réclament des honoraires importants pour ensuite disparaître sans avoir entrepris de démarche officielle. Dans d’autres cas, ces individus peuvent soumettre des demandes bâclées, compromettant ainsi les chances de succès des candidats. Cela pourrait entraîner des conséquences graves, telles que des ordres de quitter le territoire émis par les agents frontaliers. 

Comment vous protéger? 

Le meilleur moyen de vous protéger contre les imposteurs lorsque vous recherchez des services juridiques est de vérifier systématiquement que la personne que vous choisissez est bien membre du Barreau du Québec ou de la Chambre des notaires.  

Les individus qui exercent sans droit sont souvent des personnes qui étaient avocates dans leur pays d’origine, mais qui ne sont pas autorisées à pratiquer au Québec. D’autres sont des avocates ou avocats qui ont été radiés du Barreau et qui continuent illégalement à offrir leurs services.

Ces personnes utilisent diverses stratégies pour paraître crédibles. Elles peuvent notamment : 

  • afficher sur leurs sites des logos officiels des gouvernements du Québec et du Canada, 
  • être actives sur les réseaux sociaux, 
  • publier de faux témoignages positifs pour donner l’illusion qu’ils ont une clientèle satisfaite, 
  • faire signer des documents administratifs qui semblent authentiques.

Quels sont vos recours?  

Si vous avez fait affaire avec une fausse avocate ou un faux avocat, vous pouvez porter plainte auprès du Barreau du Québec ou du Barreau de Montréal.  

Si vous vous faites escroquer par une fausse avocate ou un faux avocat, vous avez également d’autres options. Vous pouvez, par exemple, poursuivre l’imposteur devant un tribunal civil, généralement la des petites créances pour les dommages subis au-delà des pertes financières.  

Enfin, dans certains cas, vous pouvez également porter plainte à la police pour fraude.