Travail

La responsabilité de l'employeur pour la faute de son employé

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On dit souvent que chacun est responsable de ses propres gestes. Mais qu’arrive-t-il si un employé cause un dommage à une personne alors qu’il se trouve dans le cadre de ses fonctions? Qui est responsable du dommage causé : l’employé ou l’employeur?

Un employeur peut-il être tenu responsable des actes fautifs posés par ses employés?

Oui, mais sous certaines conditions. La loi prévoit qu’une personne qui commande à une autre personne d’exécuter certains actes pour son compte est tenue de réparer les dommages causés par la faute de cette personne dans l’exécution de ses fonctions.  

La loi est sévère envers l’employeur car, une fois que la victime fait la preuve qu’un employé a commis une faute et qu’il était dans le cadre de l’exécution de ses fonctions, l’employeur est présumé responsable de l’incident et ainsi des dommages survenus. Ceci signifie qu’un employeur peut être tenu responsable même s’il n’a personnellement commis aucune faute. Par contre, veuillez noter que la responsabilité de l’employé ne disparaît pas du seul fait que l’employeur est tenu responsable. 

Exemple : Étienne est sauveteur à la piscine municipale. Au cours de son tour de garde, un enfant s’est noyé pendant qu’Étienne parlait à son téléphone cellulaire avec sa copine. Son employeur pourrait être poursuivi par les parents du petit pour la faute qu’Étienne a commise dans le cadre de ses fonctions. Les parents pourraient aussi choisir de poursuivre Étienne en plus de poursuivre son employeur.

À quelles conditions la responsabilité de l’employeur peut-elle être engagée?

L’employeur est présumé responsable de la faute de son employé et est tenu d’indemniser la victime à la condition que cette dernière prouve les éléments suivants : 

1. La personne qui a commis la faute est l’employé de la personne poursuivie.  

Une personne est l’employeur d’une autre personne lorsqu’il existe entre eux un lien de subordination. Cela signifie généralement que l’employeur exerce un pouvoir de contrôle, d’encadrement, de surveillance ou de direction sur les actions de son employé.  

Certains signes peuvent démontrer un lien de subordination : le fait de donner des ordres, des directives, des instructions sur la façon dont une tâche doit être exécutée. Le fait de devoir rendre des comptes à une personne sur le travail exécuté peut également s’avérer une preuve de subordination. 

2. L’employé a commis une faute.

Généralement, une personne commet une faute lorsqu’elle enfreint une règle de conduite qui s’impose à elle (suivant les circonstances, les usages ou la loi). Pour évaluer si un employé a commis une faute, sa conduite doit être comparée avec celle d’une personne prudente et diligente qui exerce les mêmes fonctions dans des circonstances semblables. Pour en savoir plus, consultez l’article La responsabilité civile

Exemple : pour évaluer si Étienne, notre sauveteur, a commis une faute, il faut comparer sa conduite à celle qu’un sauveteur prudent et diligent aurait eue dans les mêmes circonstances. Si cette comparaison fait dire au juge qu’Étienne n’a commis aucune faute puisqu’il a fait ce qu’il devait faire, son employeur ne peut être contraint de dédommager les parents de la victime.

3. Cette faute a été commise alors que l’employé était dans l’exécution de ses fonctions.

Un employé est dans l’exécution de ses fonctions lorsqu’il agit pour le compte et dans l’intérêt de son employeur ou lorsqu’il obéit aux ordres de son employeur ou exécute les tâches pour lesquelles il a été engagé. Un employé engagera notamment la responsabilité de son employeur dans les cas suivants : 

  • s’il exécute mal les tâches qui lui ont été confiées et que son inhabileté, sa négligence ou son imprudence cause un dommage;  
  • s’il exécute une tâche qui n’est pas strictement celle pour laquelle il a été engagé, mais qui est faite pour le bénéfice de son employeur. C’est le cas, par exemple, d’un préposé à la réception d’entretien d’appareils qui prend l’initiative de réparer l’appareil d’un client, alors qu’il n’y connaît rien, et qui cause un dommage. 

Afin de déterminer si l’employeur est responsable, il faut aussi prendre en considération l’objectif recherché par l’employé lorsqu’il a posé son geste. Un employeur ne sera probablement pas tenu responsable si l’acte posé, même s’il a été fait sur les lieux ou pendant les heures de travail, avait trait à la vie personnelle de l’employé ou avait un but étranger à son emploi.  

Exemple : un employé qui emprunte le marteau-piqueur de son employeur et qui, en l’utilisant à des fins personnelles, cause un dommage n’engagera pas la responsabilité de son employeur. 

Attention! Dans certaines circonstances spécifiques, un employeur pourrait être tenu responsable de la faute de son employé même si ce dernier n’agissait pas dans le cadre de son emploi ou pour le bénéfice de son employeur. Par exemple, un caissier de banque dérobant des clients vulnérables pourrait engager la responsabilité de la banque si cette dernière a été négligente dans les mesures qu’elle a mises en place pour protéger ses clients.

Quels sont les éléments que l’employeur peut invoquer pour se dégager de sa responsabilité?

Afin de se dégager de sa responsabilité, un employeur devra prouver l’un ou l’autre des éléments suivants: 

  • Il n’est pas l’employeur de la personne qui a commis la faute.
  • Son employé n’a commis aucune faute.
  • La faute a été commise par l’employé en dehors de l’exécution de ses fonctions. 
  • Le dommage résulte de la faute de la victime elle-même.
    • L’employeur peut se dégager totalement de sa responsabilité s’il prouve que la victime a commis une faute et que c’est uniquement cette faute qui est à la cause des dommages. Il peut aussi arriver que la victime soit partiellement tenue responsable des événements. Dans ce cas, le tribunal peut considérer de partager la responsabilité entre la victime, l’employé (le cas échéant) et l’employeur (la condamnation de l’employeur est alors moindre).  
  • Le dommage résulte de la faute d’un tiers.
    • L’employeur peut réussir à se dégager complètement de responsabilité s’il prouve que le véritable responsable de l’entièreté des dommages n’est ni la victime, ni son employé, mais une autre personne.  
  • Le dommage a été causé par une force majeure.  
    • On qualifie de force majeure un événement imprévisible et irrésistible qui cause un dommage ou, de façon plus large, qui empêche une personne de se conformer à ses obligations. Il s’agit bien souvent d’événements liés à la nature : pluie torrentielle, verglas, tornade, etc. 

Un employeur peut-il être tenu responsable si l’employé pose un acte criminel dans le cadre de ses fonctions?

Oui. Le caractère délictuel ou criminel d’un acte n’écarte pas la responsabilité de l’employeur, dans la mesure où cet acte se situe dans le cadre de l’emploi et des tâches pour lesquelles un employé a été engagé. 

Exemple : un gardien de sécurité qui est embauché dans le but de faire respecter la tranquillité dans un bar pourrait engager la responsabilité de son employeur s’il commet des voies de faits sur des clients en les expulsant. 

Une personne qui travaille bénévolement pour quelqu’un peut-elle engager la responsabilité de celui-ci?

Oui. L’existence d’un contrat d’emploi entre deux personnes n’est pas nécessaire. Il suffit que la personne qui agit par amitié ou dans un but d’entraide soit sous les ordres d’une autre personne pour que le tribunal le considère comme un employé. Le juge devra examiner tous les faits pour tirer une conclusion. 

La victime peut-elle poursuivre autant l’employeur que l’employé pour l’acte fautif que ce dernier a posé? 

Oui. En effet, la victime a le choix de poursuivre autant l’employé personnellement que son employeur. En fait, rien ne l’empêche de cumuler les deux recours et de poursuivre ces deux personnes en même temps.