Droits et société

Exigences linguistiques : exploiter une entreprise au Québec 

Le projet de loi 96 a modifié certaines des lois linguistiques du Québec. Le présent article est à jour et reflète les règles linguistiques actuelles.

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La Charte de la langue française fait du français la langue habituelle des affaires au Québec. À moins d’exception, toute personne, toute société ou tout organisme à but lucratif ou non doit respecter les règles définies dans la Charte s’il offre des produits ou des services au Québec. À défaut de suivre ces règles, il s’expose à des amendes ainsi qu’à d’autres sanctions. Les règles traitent d’une variété de sujets, comme la langue des produits ou des services, des communications publiques, des communications avec le gouvernement et des noms d’entreprise. 

Toute personne, toute société ou tout organisme qui offre des produits ou des services au Québec (« entreprises ») doit respecter les exigences linguistiques énoncées dans la Charte. À moins d’exception, les règles suivantes s’appliquent aux entreprises, toutes tailles confondues.

Service au public 

Les entreprises qui emploient au moins cinq personnes doivent être en mesure de servir le public en français. Cela signifie qu’un nombre suffisant de personnes employées présentes sur les lieux doit avoir une connaissance adéquate du français pour pouvoir communiquer avec la clientèle.

Cela dit, une entreprise peut continuer de servir des personnes et d’autres entreprises en anglais ou dans une autre langue si c’est ce que souhaite la cliente ou le client, pourvu que cette dernière ou ce dernier ne demande pas d’être servi en français.  

Les messages de télémarketing, les messages d’accueil et les messages vocaux doivent inclure une version française s’ils sont utilisés au Québec. 

Contrats auprès de clientes ou de clients 

Lorsque les entreprises concluent un contrat avec une personne ou une autre entreprise, le contrat peut être rédigé dans n’importe quelle langue, pourvu que toutes les parties concernées soient d’accord. 

Cependant, les contrats d’adhésion, parfois appelés contrats types, doivent être rédigés en français. Il s’agit de contrats qui sont déjà rédigés ou dont les clauses essentielles ne sont pas négociables, comme les contrats pour un forfait de téléphone cellulaire, les polices d’assurance et les baux.  

Une fois que la version française d’un contrat d’adhésion a été fournie, il est possible pour les entreprises de fournir une version dans une autre langue si la cliente ou le client en fait explicitement la demande. L’entreprise et la cliente ou le client peuvent choisir de signer le contrat d’adhésion dans la langue de leur choix. 

Publications écrites, documents commerciaux, sites Web et réseaux sociaux 

Les catalogues et brochures, les bons de commande, les reçus et les garanties, qu’ils soient en ligne ou hors ligne, doivent être rédigés en français. Il peut y avoir une version en anglais ou dans une autre langue, pourvu qu’une version française de qualité comparable soit disponible.  

Une entreprise doit diffuser une version française de son site Web si elle possède une adresse au Québec et vend des produits ou des services à la population québécoise. Une autre langue peut également être employée, pourvu qu’une version française soit disponible. 

Parfois, une entreprise utilise son site Web à des fins de « commerce électronique » au Québec, c’est-à-dire pour vendre des produits ou des services aux clientes et clients du Québec sur Internet plutôt que dans un magasin physique. Le cas échéant, tous les renseignements dont la clientèle a besoin pour effectuer un achat doivent être disponibles en français. Cela comprend les renseignements au sujet du produit ou du service, les bons de commande, les factures et les reçus. Il est possible d’employer l’anglais ou une autre langue, pourvu qu’une version française soit disponible.  

Si une cliente ou un client publie un commentaire dans les médias sociaux ou sur le site Web de l’entreprise dans une langue autre que le français, l’entreprise peut lui répondre dans cette langue. Si la cliente ou le client publie un commentaire en français, l’entreprise doit lui répondre en français. 

Pour en savoir plus sur la façon dont l’Office québécois de la langue française (OQLF) interprète les règles associées aux comptes de médias sociaux, consultez le guide intitulé « Les médias sociaux et la Charte de la langue française : Guide pratique à l’intention des entreprises »

Exceptionnellement, les publications écrites et les documents commerciaux en ligne et hors ligne peuvent être rédigés en anglais ou dans une autre langue, sans être accompagnés d’une version française : 

  • dans les médias non francophones, 
  • lorsqu’ils sont transmis à une personne qui a demandé par écrit de recevoir de tels documents dans une langue donnée,  
  • lorsqu’ils concernent des produits ou des activités culturelles ou éducatives, 
  • lorsqu’ils concernent un événement destiné uniquement à un public spécialisé ou restreint. 

Produits et emballages 

Tout ce qui est écrit sur un produit vendu au Québec, sur son emballage ou dans les documents accompagnant le produit doit être en français. Il est possible d’inclure des traductions dans une ou plusieurs langues en plus du texte en français, pourvu que le français soit accessible et de qualité comparable aux versions rédigées dans d’autres langues. 

Par exemple, les guides d’utilisation d’un produit et les livrets de garantie peuvent être rédigés en français et en anglais. 

Il existe quelques exceptions à cette règle. Notamment, un produit peut être rédigé exclusivement en anglais ou dans une autre langue s’il s’agit d’un produit culturel ou éducatif, comme un livre, une revue ou un film. 

Les entreprises de commerce électronique qui n’ont pas d’adresse au Québec doivent également respecter ces règles. 

Affichage public et publicité 

L’affichage public et la publicité commerciale doivent normalement se faire en français. Cependant, l’anglais ou une autre langue peut accompagner le français, pourvu que le français apparaisse de façon « nettement prédominante ». Cela signifie que le texte en français doit avoir un impact visuel beaucoup plus important. C’est le cas si le texte en français occupe au moins deux fois plus d’espace. De plus sa lisibilité et sa visibilité doivent être au moins équivalentes à celles du texte rédigé dans une autre langue. 

Cette règle s’applique aux affiches, aux enseignes, aux autocollants et aux autres publicités visibles à toutes et à tous dans des lieux publics, que ceux-ci se trouvent à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement de l’entreprise. 

Dans certains cas, seul le français peut être utilisé, comme dans les publicités sur les autobus et sur certains panneaux-réclames de grande taille. 

Dans d’autres cas, c’est possible d’utiliser seulement l’anglais ou une autre langue. C’est notamment le cas des enseignes et des publicités pour des produits ou des activités culturels, comme une pièce de théâtre ou une conférence, ainsi que la publicité dans des médias non francophones et des messages religieux, politiques, idéologiques ou humanitaires qui ne sont pas utilisés à des fins lucratives. 

La langue des communications avec le gouvernement provincial  

En règle générale, les biens et les services offerts au gouvernement du Québec doivent être en français. De même, les contrats et autres communications écrites auprès du gouvernement doivent être rédigés exclusivement en français. C’est le cas, par exemple, des communications concernant les permis, les subventions ou toute autre forme d’autorisation ou d’aide financière. 

Dans des cas exceptionnels, le gouvernement du Québec peut employer le français et une autre langue dans ses communications. Par exemple, un organisme gouvernemental qui veille à ce que les préoccupations de la communauté d’expression anglaise soient prises en compte peut transmettre un courriel en français et en anglais à un organisme situé au Québec. 

Les règles applicables aux noms et aux logos 

Toutes les entreprises qui vendent des produits ou des services au Québec doivent posséder un nom d’entreprise en français. Des patronymes, des toponymes et des expressions en anglais ou dans une autre langue peuvent être utilisés pour préciser un terme générique comme « quincaillerie » ou « restaurant ». 

Une entreprise peut aussi posséder un nom dans une autre langue, mais il existe des règles à savoir quand et comment un nom qui n’est pas en français peut être utilisé au Québec. Par exemple, ce nom peut être utilisé seul dans des textes ou des documents rédigés uniquement dans une langue autre que le français. 

Une entreprise peut aussi utiliser une marque de commerce, comme un nom, un logo ou un slogan, dans une langue autre que le français dans d’autres situations. 

  • Sur les produits, les emballages, les publications écrites et les documents commerciaux, une marque de commerce qui n’est pas en français peut être utilisée seule s’il s’agit d’une marque de commerce consacrée par l’usage, qu’elle soit enregistrée ou non, et qu’aucune version française n’a été enregistrée.  
  • Dans l’affichage public et la publicité commerciale, une marque de commerce dans une langue autre que le français peut être utilisée s’il s’agit d’une marque de commerce consacrée par l’usage, qu’elle soit enregistrée ou non, et qu’aucune version française n’a été enregistrée. Une présence suffisante du français doit accompagner l’utilisation de la marque de commerce, tel qu’une description des produits ou des services en question, ou encore un slogan. 

Pour en savoir plus, consultez notre article Choisir le nom et le logo de votre entreprise ou visitez le site web de l’Office québécois de la langue française (OQLF). 

Nouvelles règles à compter du 1er juin 2025 

À partir du 1er juin 2025, seule une marque de commerce enregistrée dans une langue autre que le français pourra être utilisée dans l’affichage public et la publicité commerciale, et ce, seulement si aucune version française n’a été enregistrée. Le texte français accompagnant la marque de commerce devra être nettement prédominant.

Une règle similaire s’appliquera au texte sur les produits. Seules les marques de commerce enregistrées dans une langue autre que le français pourront être utilisées.

Les conséquences en cas de violation 

Toute personne qui a connaissance d’une violation de la Charte peut présenter une plainte à l’OQLF. L’OQLF peut également décider d’effectuer des inspections et des enquêtes de son propre gré. 

L’OQLF peut émettre un avertissement à une entreprise lui demandant de se conformer à la loi dans un certain délai. Une entreprise qui croit que l’avertissement n’est pas justifié peut le contester devant Tribunal administratif du Québec dans les 30 jours suivant la réception de l’avertissement. 

Si une entreprise ne se conforme pas à la loi dans le délai fixé, elle pourrait se voir imposer une amende se situant entre 3 000 $ à 30 000 $ pour chaque jour que la violation se poursuit. Le montant de l’amende est doublé en cas de première récidive, et triplé pour toute récidive additionnelle. 

L’OQLF peut aussi se tourner vers le tribunal pour demander le retrait ou la destruction des affiches, pancartes, publicités ou panneaux-réclames qui contreviennent à la loi.  

Une personne ayant subi un dommage en raison d’un contrat qui a été conclu en violation des règles peut s’adresser au tribunal pour demander l’annulation du contrat ou d’une partie du contrat. Cela signifie que tout ce qui a été effectué en vertu du contrat ou de la partie nulle du contrat, tel qu’un paiement ou un transfert de propriété, doit être annulé. Par ailleurs, la personne ou l’entreprise ayant subi un dommage peut plutôt choisir de demander au tribunal de réduire leurs obligations prévues au contrat, notamment en diminuant le montant qu’elle doit payer. Le tribunal peut imposer toute autre sanction qu’il juge appropriée. 

Exceptionnellement, si une entreprise enfreint les règles linguistiques de manière répétée en dépit des avertissements et des amendes, le gouvernement pourrait suspendre ou révoquer tout permis délivré ou toute autorisation accordée à l’entreprise. Cette décision peut être contestée devant le Tribunal administratif du Québec dans un délai de 30 jours.